dimanche 30 septembre 2018

Une autre vie



J'ai déjà posté ici un poème de Borges sur la vieillesse. En voici un autre, qui m'a fait voyager et rêver, imaginer une vie plus légère et plus simple, où l'on n'est poursuivi par aucun dictat ni interdiction... Ce n'est qu'un rêve, un rêve qui passe et disparaît comme l'instant où je l'ai lu. Et les regrets que semblent évoquer la dernière phrase ne sont là que pour nous inciter à bouger.



Instants
Si je pouvais de nouveau vivre ma vie,
dans la prochaine je tâcherais de commettre plus d’erreurs.
Je ne chercherais pas à être aussi parfait, je me relaxerais plus.
Je serais plus bête que je ne l’ai été,
en fait je prendrais très peu de choses au sérieux.
Je mènerais une vie moins hygiénique.
Je courrais plus de risques,
je voyagerais plus,
je contemplerais plus de crépuscules,
j’escaladerais plus de montagnes, je nagerais dans plus de rivières.
J’irais dans plus de lieux où je ne suis jamais allé,
je mangerais plus de crèmes glacées et moins de fèves,
j’aurais plus de problèmes réels et moins d’imaginaires.
J’ai été, moi, l’une de ces personnes qui vivent sagement
et pleinement chaque minute de leur vie ;
bien sûr, j’ai eu des moments de joie.
Mais si je pouvais revenir en arrière, j’essaierais
de n’avoir que de bons moments.

Au cas où vous ne le sauriez pas, c’est de cela qu’est faite la vie,
seulement de moments ; ne laisse pas le présent t’échapper.
J’étais, moi, de ceux qui jamais
ne se déplacent sans un thermomètre,
un bol d’eau chaude,
un parapluie et un parachute ;
si je pouvais revivre ma vie, je voyagerais plus léger.
Si je pouvais revivre ma vie
je commencerais d’aller pieds nus au début
du printemps
et pieds nus je continuerais jusqu’au bout de l’automne.
Je ferais plus de tours de manège,
je contemplerais plus d’aurores,
et je jouerais avec plus d’enfants,
si j’avais encore une fois la vie devant moi.
Mais voyez-vous, j’ai 85 ans…
et je sais que je me meurs.
Jorge Luis Borges



     

Illustrations : Ito Jakuchu (ce peintre japonais du XVIIIe siècle est exposé cet automne au Petit Palais à Paris).

dimanche 23 septembre 2018

Magnétisme

Comme je vous l'avais annoncé, nous organisons le 11 octobre une conférence sur le magnétisme.
Notre intervenant sera Régis Dannhauser qui exerce dans les environs de Grenoble.
Nous sommes très intéressés par ce qu'il aura à nous dire et par le sujet qu'il va aborder.
En effet, le magnétisme utilise comme les médecines traditionnelles chinoises l'énergie vitale qui circule en nous et tout autour de nous. Le magnétisme est une connaissance ancestrale de cette énergie, utilisée souvent instinctivement. Nous pouvons nous aussi apprendre à la connaître, et découvrir comment ranimer en nous une énergie positive  lorsqu'elle est déséquilibrée ou circule mal. C'est donc à une connaissance de nous-mêmes qu'elle nous convie. 
Ce que nous propose Régis Dannhauser :



« Le Magnétisme, outil de guérison 

          par la connaissance de Soi »

 "Le magnétisme est avant tout une écoute de soi. 
Cette écoute m'ouvre à mon ressenti, à mes intuitions. Je découvre les énergies qui me traversent, mes émotions, celles des autres, leurs interactions dans ma Vie, comment agir consciemment au lieu de ré-agir, ce qui m'ouvre à mon plein épanouissement. "

Voici comment il se présente :

Régis Dannhauser est responsable technique, magnétiseur, co-fondateur de l'Association Magnétisme Energies (www.asso-ame.fr), en formation depuis 12 ans avec Marie-France O'Leary (www.art-nomade.org).



Si ce sujet vous questionne comme nous, nous vous convions à cette conférence le 11 octobre à 20h30  au Centre d'astrologie, 21, rue Expilly  38 000 Grenoble. 

Tarif : 8 € pour nos adhérents et 10 € pour les non adhérents

Vous pouvez vous inscrire par mail sur : assoc.altair@gmail.com


dimanche 16 septembre 2018

Réflexions cycliques

Tout est parti du titre de la conférence d'astrologie mondiale de Sylvie Lafuente Sampietro pour 2018 qui m'est revenue en mémoire lorsque nous avons préparé la conférence pour 2019.
Ce titre, le voici : "Lâcher prise au passé pour construire l'avenir." C'était le défi de l'humanité pour cette année 2018. 




Comment interpréter le lâcher prise au passé ? 
Sur psychologies.com, j'ai trouvé des éléments sur le lâcher prise individuel. Ces mots peuvent très bien s'adapter à l'humanité pour peu qu'on les entende bien : d'ailleurs, Sylvie Lafuente passe souvent dans ses conférences des défis pour l'humanité à ce qui nous attend individuellement. 
"Au commencement de toute "prise" se trouve l’ego, une conviction, un ressenti dont tout découle. Moi, Pierre ou Paul, j’existe indépendamment du tout, séparé, seul face à l’autre...
Le lâcher-prise ne sous-entend en rien une négation de l’individualité. Pierre reste Pierre, Paul demeure Paul. Simplement, la partie se reconnaît comme expression du tout, la vague se sait forme du grand océan et, du même coup, reconnaît les autres vagues comme autant d’expressions de ce qu’elle-même est au plus profond. Par un apparent paradoxe, l’autre à la fois disparaît – nul ne peut plus m’être essentiellement étranger – et se trouve comme jamais reconnu dans sa différence existentielle. Le moi séparé cesse d’être l’étalon, la mesure de toute chose. Il n’y a plus de moi pour exiger de l’autre qu’il se conforme à mes critères. Le lâcher-prise se produit dès lors que le moi accepte de l’autre, de tout autre, qu’il soit autre."




Et quel intérêt de ressasser le passé ?
"Quoi que mon mental prétende, je me trouve là où sont mes pieds. Si je pense au passé ou au futur, c’est toujours maintenant. Passé, futur, ailleurs n’existent qu’en tant que pensées surgissant ici et maintenant.
Cette pratique n’exclut en rien l’aptitude à prévoir, à organiser ni ne nous dispense de nos responsabilités. L’attitude d’ouverture inconditionnelle à l’instant ne conduit nullement à baisser les bras, à tolérer l’intolérable. Le lâcher-prise, dans l’immédiateté, est totalement compatible avec l’action dans la durée. Le lâcher-prise n’est pas se résigner mais être conscient de ses limites...
 Lâcher prise, c’est aussi cesser d’aborder l’existence avec une mentalité d’"assuré tous risques". Quelle que puisse être la prétention du moi à contrôler l’avenir, la vie n’est pas une mutuelle et n’offre aucune garantie. " Gilles Farcet dans Psychologies.com




Nous voici donc, nous les hommes,  à un moment où nous devons accepter que l'autre  est autre et que nous ne pouvons exiger de lui qu'il se conforme à nos critères. Et pour construire l'avenir, nous ne devons pas ressasser le passé, mais être conscients de nos limites en sachant que nous ne pouvons contrôler l'avenir. Et donc que nous n'avons aucune garantie de sécurité pour les années à venir.
Ces thématiques sont très présentes dans notre monde aujourd'hui : reconnaître l'autre, passer d'un ancien monde vers un nouveau, préparer l'avenir sans pouvoir donner de certitudes... 
Le programme est donc chargé pour l'humanité ! Aussi ne suis-je pas étonnée que le programme pour 2019 ressemble à celui de 2018 : "Conclure le passé et impulser le futur.".
Cependant, nous sommes à la fin de trois cycles très importants au niveau mondial. 2019 sera l'occasion de les conclure en en tirant les leçons. Il est très important de laisser les cycles, les projets, les histoires, se conclure. Comment pouvons-nous avancer si nous ne tirons pas les enseignements de ce que nous avons vécu ?
Puis en 2020, les nouveaux cycles prendront leur forme petit à petit, nous aurons eu le temps de nous y préparer en 2018 et 2019. L'impulsion nouvelle pourra alors être donnée. Cette possibilité de renouveau s'appliquera particulièrement à l'Europe.
« Acceptez la vie comme elle vient. La voie la plus sûre pour découvrir la vérité est de ne plus résister à ce qui se présente. » Jean Klein

Et pour terminer en poésie, un haïku de Bashô:


Ce chemin -
Seule la pénombre d'automne
L'emprunte encore.



Les oeuvres de Zao Wou-ki illustrent cet article

Ce texte est une interprétation personnelle et libre des enjeux de l'astrologie mondiale à partir du titre de la conférence de Sylvie Lafuente Sampietro. Je vous indiquerai bientôt ici la vision de Sylvie Lafuente Sampietro.

dimanche 9 septembre 2018

Chacun fait sa part

Chacun participe à une oeuvre plus grande que lui. On peut ne rien voir, ne pas vouloir le voir et se sentir accablé ou tout simplement être fier d'y participer.
Quelle valeur attribuons-nous à notre travail ? Devons-nous accepter notre vie telle une mission qui nous serait attribuée ?
Voici un conte pour illustrer ceci, raconté par Henri Gougaud mais il est en général attribué à Charles Péguy. 



Les trois casseurs de cailloux.

     Un pèlerin, un soir d'été, parvint sur un chantier de ville peuplé d'ouvriers poussiéreux occupés à mille besognes de bois lourd, de forges sonnantes, de meules et de pierres taillées. Il fit halte au bord de la route où des hommes au torse luisant fracassaient à grands coups de masse, ça et là, des quartiers de rocs. L'un d'eux semblait exténué.
_ Dur labeur, dit le pèlerin.
_ Épuisant, lui répondit l'autre, abrutissant et sans espoir. De l'aube au soir, casser des pierres, est-ce une vie ? Non, c'est l'enfer. Vivement la mort, que je dorme !
     Un compagnon, à quelques pas, essuya son front ruisselant. Le pèlerin lui vint devant.
_ Votre misère me fait peine, lui dit-il. Je m'en souviendrai. Sur le tombeau du bon saint Jacques je prierai pour vous, c'est promis.
     Le gars désigna l'épuisé.
_ Priez surtout pour ce pauvre homme. Moi, grâce à Dieu, je tiens le coup. C'est que j'ai trois enfants petits et une femme qui s'escrime à les élever comme il faut. J'ai besoin de forces. Ils m'en donnent. Si je trime ainsi, c'est pour eux.
     A l'écart parmi les cailloux, les geignements, les coups de masse, naquit soudain une chanson.
_ Voilà le fou qui se réveille, dit le jeune père, en riant.
     Le pèlerin tourna la tête et découvrit un grand luron apparemment infatigable. Il cognait d'un cœur si vaillant qu'il faisait voler des éclats jusque dans ses cheveux frisés.
_ Quel entrain ! dit le pèlerin. Il me semble pourtant malingre. Où puise-t-il donc sa vigueur ?
_ Je n'en sais rien, répondit l'autre. Allez lui poser la question.
     Dix pas plus loin :
_ Holà, bonhomme, calme-toi, tu vas t'effondrer !
_ Je sais bien ce que vous pensez, répondit le joyeux gaillard. Que je suis idiot.Peu m'importe. Je casse des cailloux, c'est vrai. C'est fatigant. C'est mal payé. Mais ma force est là, dans l'étoile que je me suis plantée au front. Je ne suis pas un simple esclave.
     Et cognant son torse du poing :
_ Je bâtis une ville, moi !


dimanche 2 septembre 2018

Création

"J'écrivais des silences, des nuits, je notais l'inexprimable. Je fixais des vertiges."nous dit Rimbaud dans Une saison en enfer.




Cette question de la création est passionnante. D'où provient-elle ? Comment la susciter ?
J'ai retrouvé des paroles de Fabienne Verdier. Elle fut élève des maîtres chinois dans l'art de la calligraphie pendant dix ans, elle a depuis trouvé sa voie personnelle. Son cheminement mérite d'être suivi. Même si cette alchimie de la création des œuvres ne peut être expliquée, nous pouvons au moins écouter ce que les créateurs ont à nous dire pour expliquer le processus qui les conduit vers l'expression de l'inexprimable !




Le maître chinois de Fabienne Verdier lui a donné ces conseils :

"Recherche sans cesse et sans répit le singulier, l'insolite, détruis les frontières ou catégories esthétiques forgées par nos cultures et n'aie pas peur de paraître parfois folle ou excentrique. il s'agit de retrouver les mille et une manifestations de la nature des choses...
Il faut apprendre, puis oublier ce qu'on a appris, retrouver le naturel jusqu'à parvenir à créer sans effort. Cela paraît simple mais, en fait, il est très difficile de retrouver sa véritable nature (...), les modes nous façonnent à notre insu.
Nourris ton esprit, pas seulement de connaissances livresques comme tant de gens, mais de la réalité qui t'entoure, de tes songes aussi - entraîne-toi à rêver...
La plus haute qualité de l'esprit est de produire des intuitions. Arrête de cogiter, d'essayer de comprendre : oublie, oublie, et ton esprit comprendra "subitement" pour toi.
(...) La rythme est capital en musique mais aussi dans les autres arts, comme l'art de vivre. Sans rythme, il n'y a pas d'art." Fabienne Verdier rapportant les paroles de son maître chinois




Elle-même tente de nous expliquer son cheminement vers l'élaboration de son oeuvre :
"Comment saisir l'insaisissable ? Comment traduire l'intraduisible ? Entre les théories et l'éveil réel aux mystères du vivant, l'apprentissage est si long qu'on a peine à y croire.

Il devenait nécessaire d'oublier le temps, de s'oublier soi-même ainsi que toutes pensées, opinions et cultures acquises. Le non-être apparent touche en quelque sorte à l'illimité de l'être. L'esprit libre devient alors fluide et mobile.
Au gré du souffle du pinceau je vais donc m'attacher à explorer le mystère végétal, le génie propre à chaque être : la pudeur discrète d'un brin d'herbe.
Goûter à l'émerveillement de ce qui est, de ce qui devient, comprendre les forces qui façonnent...
Au fond, la peinture comme la calligraphie est une pratique solitaire, un don de soi, un chemin assez semblable à celui des moines, qui résulte souvent d'une ascèse et de silence.
Je m'intéresse à l'insaisissable, l'inexprimable, l'indicible, à l'essence de la réalité dans toutes ses manifestations."
Fabienne Verdier





Cette voie solitaire ressemble effectivement beaucoup  à celle des hommes en quête de spiritualité et d'abandon de soi pour retrouver l'essence de l'univers. Fabienne Verdier tente de restituer  grâce au rythme de sa peinture le souffle de l'univers. 
Sur ce sujet, elle confie (à Aliette Armel dans la revue Ultreïa): 
"J'ai trouvé chez Gilles Deleuze une phrase qui évoque le point où j'en suis aujourd'hui : "En art, et en peinture comme en musique il ne s'agit pas de reproduire ou d'inventer des formes, mais de capter des forces.(...) La célèbre formule de Klee "non pas rendre le visible, mais rendre visible" ne signifie pas autre chose. La tâche de la peinture est définie comme la tentative de rendre visibles des forces qui ne le sont pas."