dimanche 28 février 2021

Couleurs des jours


Couleurs d'espoir comme le poème de Paul Eluard, sourire de la vie contre la morosité et les jours monotones... Célébrer le printemps et la vie qui renaît, la vie à partager.


La nuit n'est jamais complète.
Il y a toujours puisque je le dis,
Puisque je l'affirme,
Au bout du chagrin,
une fenêtre ouverte,
une fenêtre éclairée.
Il y a toujours un rêve qui veille,
désir à combler,
faim à satisfaire,
un cœur généreux,
une main tendue,
une main ouverte,
des yeux attentifs,
une vie : la vie à se partager.

Paul Éluard





    Oh les beaux jours ! Les voici qui reviennent  avec toutes leurs couleurs joyeuses.

dimanche 21 février 2021

Etre assez courageux

                   

J'ai retrouvé dans un cahier ces citations de Rainer Maria Rilke que j'avais notées au cours d'un stage.

Elles sont pour moi toujours aussi puissantes et j'aimerais en avoir écouté les messages plus souvent...

"Nous devons accepter notre existence aussi loin qu'elle puisse aller; tout, même l'inouï doit y être possible. C'est là au fond le seul courage que l'on exige de nous : être assez courageux pour accueillir ce qui peut venir à notre rencontre de plus étrange, de plus extravagant, de plus inexplicable."



Et voici le résultat de ce courage :

"Hommes, levez les yeux !

Vous près du feu, là-bas, qui connaissez le ciel sans limite, 

interprètes des étoiles, venez !

Voyez, je suis un astre nouveau qui s'élève.

Tout mon être brûle et rayonne si fort,

si prodigieusement plein de lumière que le firmament

profond ne me suffit plus."



Et voici le poème qui parle directement à notre âme et même si l'on ne comprend pas toujours ce que disent les mots, la musique est là, qui dit tout :

"De tous ses yeux la créature
voit l’Ouvert. Seuls nos yeux
sont comme retournés et posés autour d’elle
tels des pièges pour encercler sa libre issue.
Ce qui est au-dehors nous ne le connaissons
que par les yeux de l’animal. Car dès l’enfance
on nous retourne et nous contraint à voir l’envers,
les apparences, non l’ouvert, qui dans la vue
de l’animal est si profond. Libre de mort...
Mais nous autres, jamais nous n’avons un seul jour
le pur espace devant nous, où les fleurs s’ouvrent
à l’infini. Toujours le monde, jamais le
Nulle part sans le Non, la pureté
insurveillée que l’on respire,
que l’on sait infinie et jamais ne désire.

Extrait des Elegies de Duino - Rainer Maria Rilke


Terminons avec cette parole de Rumî qui nous dit la force du silence intérieur :

"Il y a une voix qui n'utilise pas de mots. 
Utilise-là."

dimanche 14 février 2021

La mort comme par enchantement

Jean-Claude Carrière nous a quittés... J'ai aussitôt ressorti "Le cercle des menteurs" pour retranscrire un conte qui nous parle de la mort.



Voici donc ce récit issu de la tradition arabe:

La danse de mort

Deux princes s'affrontèrent en une très rude bataille. L'un des deux, celui qui s'était soulevé contre l'autre, fut vaincu et traîné en captivité. Il savait qu'il devait avoir la tête tranchée, pour maintenir fermes les lois de l'empire. Cependant, comme il s'agissait d'un prince de haute lignée, le vainqueur l'installa magnifiquement dans l'un des palais et le fit traiter selon son rang. Serviteurs, musiciens, danseuses, s'empressaient autour de lui et sa captivité semblait une fortune. 



Mais le prince captif, qui savait qu'il allait mourir, gardait un visage triste au milieu des fêtes. Des semaines, des mois, passèrent ainsi, jusqu'au jour où le rebelle condamné fit parvenir un message au vainqueur en lui demandant comme une grâce une mort rapide.

Le lendemain, le vainqueur invita le vaincu dans son propre palais. Le repas, la musique et les danses apparurent incomparables à tous les convives_ sauf au captif qui gardait son visage triste et qui soudain s'écria :

_ Quand me donneras-tu la mort ?

_ Elle vient, répondit le vainqueur. Regarde, voici le premier de mes bourreaux.

Un homme superbe et masqué, qui tenait à la main droite un sabre étincelant, pénétra dans la grande salle et se mit à danser. Il dansait avec une force, avec une élégance extraordinaires. Son épée volait dans l'air avec grâce. Tous le regardaient avec fascination, tous, même le prince captif, auprès duquel le bourreau-danseur passa à plusieurs reprises.

La danse merveilleuse dura longtemps, jusqu'à ce que le captif, sortant de sa fascination, dise au prince vainqueur :

_ Mais combien de temps durera cette danse ? Quand me feras-tu trancher la tête ?

Le vainqueur lui répondit en souriant :

_ Mais ta tête est déjà tranchée. Penche-toi un peu en avant, tu verras, elle va tomber.