dimanche 7 novembre 2021

Un anniversaire pas comme les autres

 Je vous propose aujourd'hui, une jolie histoire d'amour sous forme de conte. Elle est proposée encore une fois par Henri Gougaud.



L'anniversaire


Ces deux-là n'avaient pas toujours de quoi faire bouillir la soupe. Ils n'étaient riches que d'amour. Lui n'avait pour toute fortune qu'une antique montre en argent offerte autrefois par son père. Sa femme n'avait que sa grâce, courbes sveltes, cheveux de lune, rire clair, regard de feu doux. Les gens disaient : "Quels beaux époux !" Qui plus est, tous deux étaient nés (le hasard est un dieu folâtre), la même année, à la même heure, le même matin de juillet. Premier été de leur mariage. Voilà que s'annonce le jour des anniversaires jumeaux.

Il veut lui faire un beau, un grand, un inoubliable cadeau. Elle a envie de lui offrir elle ne sait quoi, elle réfléchit, quelque chose dont il soit fier et qu'il n'ose pas espérer. Lui sait ce qu'il voudrait pour elle : le peigne incrusté de rubis qu'il a vu à la devanture du bijoutier de son quartier. Il lui plairait, il en est sûr. Seul problème, il est hors de prix. Comment faire ? Une idée lui vient. La belle montre de son père. Elle est ouvragée à l'ancienne. "Les collectionneurs, se dit-il, recherchent ces sortes d'objets." Il y tient, bien sûr, mais qu'importe. Pour voir s'illuminer les yeux de son épouse bien-aimée, il n'est pas de regret qui tienne. Il vend sa montre au joailler, désigne le peigne précieux.

_ Faites-moi un paquet cadeau. 

Merci, bonsoir. Il est content.

Sa femme, ce même jour-là (elle revient d'un maigre marché), s'arrête devant la vitrine de la même bijouterie. Et que voit-elle ? Elle s'extasie. Une chaîne de montre en or d'une élégance de grand monde. Elle se dit, le cœur remué : "Voilà ce qu'il faut à mon homme." Elle entre. Elle demande le prix. Beaucoup trop cher. Elle réfléchit. elle sourit enfin.

_ Je l'achète. je viendrai le chercher sans faute à la fin de l'après-midi." 

Elle court à quelques rues de là, chez le perruquier des princesses, dénoue ses lourds et longs cheveux. Le maître, en connaisseur, les palpe, les caresse. Il murmure :

_ Quelle beauté !

_ Ils sont à vendre, lui dit-elle. 

Elle se fait tondre. Il paie bon prix. 

Le lendemain, dîner de fête, gâteau, bougies, fleurs et cadeaux. Une chaîne, mais rien au bout, un peigne sans rien à coiffer, à retenir, à ordonner. Chacun avait donné pour l'autre ce qu'il avait de plus précieux. Ils s'étreignent. Ils s'émerveillent. 

_ C'est l'amour vrai, se disent-ils. 

Ce fut un bel anniversaire. Ils ne l'oublièrent jamais. 



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Pour laisser un commentaire, entrez un profil : avec votre compte Google si vous en avez un, ou en anonyme ou encore avec un nom, le vôtre ou un pseudonyme.
Je lis les commentaires avant publication pour éviter les messages "toxiques" ou sans rapport avec notre association.
Merci d'avance de donner votre avis ou de partager avec nous vos idées ou découvertes.