Chacun participe à une oeuvre plus grande que lui. On peut ne rien voir, ne pas vouloir le voir et se sentir accablé ou tout simplement être fier d'y participer.
Quelle valeur attribuons-nous à notre travail ? Devons-nous accepter notre vie telle une mission qui nous serait attribuée ?
Voici un conte pour illustrer ceci, raconté par Henri Gougaud mais il est en général attribué à Charles Péguy.
Les trois casseurs de cailloux.
Un pèlerin, un soir d'été, parvint sur un chantier de ville peuplé d'ouvriers poussiéreux occupés à mille besognes de bois lourd, de forges sonnantes, de meules et de pierres taillées. Il fit halte au bord de la route où des hommes au torse luisant fracassaient à grands coups de masse, ça et là, des quartiers de rocs. L'un d'eux semblait exténué.
_ Dur labeur, dit le pèlerin.
_ Épuisant, lui répondit l'autre, abrutissant et sans espoir. De l'aube au soir, casser des pierres, est-ce une vie ? Non, c'est l'enfer. Vivement la mort, que je dorme !
Un compagnon, à quelques pas, essuya son front ruisselant. Le pèlerin lui vint devant.
_ Votre misère me fait peine, lui dit-il. Je m'en souviendrai. Sur le tombeau du bon saint Jacques je prierai pour vous, c'est promis.
Le gars désigna l'épuisé.
_ Priez surtout pour ce pauvre homme. Moi, grâce à Dieu, je tiens le coup. C'est que j'ai trois enfants petits et une femme qui s'escrime à les élever comme il faut. J'ai besoin de forces. Ils m'en donnent. Si je trime ainsi, c'est pour eux.
A l'écart parmi les cailloux, les geignements, les coups de masse, naquit soudain une chanson.
_ Voilà le fou qui se réveille, dit le jeune père, en riant.
Le pèlerin tourna la tête et découvrit un grand luron apparemment infatigable. Il cognait d'un cœur si vaillant qu'il faisait voler des éclats jusque dans ses cheveux frisés.
_ Quel entrain ! dit le pèlerin. Il me semble pourtant malingre. Où puise-t-il donc sa vigueur ?
_ Je n'en sais rien, répondit l'autre. Allez lui poser la question.
Dix pas plus loin :
_ Holà, bonhomme, calme-toi, tu vas t'effondrer !
_ Je sais bien ce que vous pensez, répondit le joyeux gaillard. Que je suis idiot.Peu m'importe. Je casse des cailloux, c'est vrai. C'est fatigant. C'est mal payé. Mais ma force est là, dans l'étoile que je me suis plantée au front. Je ne suis pas un simple esclave.
Et cognant son torse du poing :
_ Je bâtis une ville, moi !
Quelle valeur attribuons-nous à notre travail ? Devons-nous accepter notre vie telle une mission qui nous serait attribuée ?
Voici un conte pour illustrer ceci, raconté par Henri Gougaud mais il est en général attribué à Charles Péguy.
Les trois casseurs de cailloux.
Un pèlerin, un soir d'été, parvint sur un chantier de ville peuplé d'ouvriers poussiéreux occupés à mille besognes de bois lourd, de forges sonnantes, de meules et de pierres taillées. Il fit halte au bord de la route où des hommes au torse luisant fracassaient à grands coups de masse, ça et là, des quartiers de rocs. L'un d'eux semblait exténué.
_ Dur labeur, dit le pèlerin.
_ Épuisant, lui répondit l'autre, abrutissant et sans espoir. De l'aube au soir, casser des pierres, est-ce une vie ? Non, c'est l'enfer. Vivement la mort, que je dorme !
Un compagnon, à quelques pas, essuya son front ruisselant. Le pèlerin lui vint devant.
_ Votre misère me fait peine, lui dit-il. Je m'en souviendrai. Sur le tombeau du bon saint Jacques je prierai pour vous, c'est promis.
Le gars désigna l'épuisé.
_ Priez surtout pour ce pauvre homme. Moi, grâce à Dieu, je tiens le coup. C'est que j'ai trois enfants petits et une femme qui s'escrime à les élever comme il faut. J'ai besoin de forces. Ils m'en donnent. Si je trime ainsi, c'est pour eux.
A l'écart parmi les cailloux, les geignements, les coups de masse, naquit soudain une chanson.
_ Voilà le fou qui se réveille, dit le jeune père, en riant.
Le pèlerin tourna la tête et découvrit un grand luron apparemment infatigable. Il cognait d'un cœur si vaillant qu'il faisait voler des éclats jusque dans ses cheveux frisés.
_ Quel entrain ! dit le pèlerin. Il me semble pourtant malingre. Où puise-t-il donc sa vigueur ?
_ Je n'en sais rien, répondit l'autre. Allez lui poser la question.
Dix pas plus loin :
_ Holà, bonhomme, calme-toi, tu vas t'effondrer !
_ Je sais bien ce que vous pensez, répondit le joyeux gaillard. Que je suis idiot.Peu m'importe. Je casse des cailloux, c'est vrai. C'est fatigant. C'est mal payé. Mais ma force est là, dans l'étoile que je me suis plantée au front. Je ne suis pas un simple esclave.
Et cognant son torse du poing :
_ Je bâtis une ville, moi !
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