Reprenant quelques extraits d'une l'émission "Les racines du ciel" consacrée à Jacqueline Kelen, j'ai trouvé ses propos sur le combat spirituel très éclairants sur le monde d'aujourd'hui et sur la spiritualité.
"Il me semble que de nos jours le combat spirituel est aussi un combat contre les puissances ténébreuses, qui ne sont pas des petits démons ni le diable aux pieds fourchus, mais des forces de désespoir, des forces de désertion, des forces d'inertie", nous dit-elle.
A quoi Leili Anvar lui répond :
"Cela me rappelle qu'en islam, on appelle le grand jihâd, la grande guerre sainte qui est le combat contre les passions, un combat de chevaliers de la foi contre eux-mêmes. Cela me fait penser aussi au poète mystique Kabîr, un nom qui signifie "le grand", qui a écrit au XVIe siècle et dont la vie se perd un peu dans la légende. Il était certainement d'une caste hindoue, shivaïste, mais s'est probablement converti à l'islam. Il tient en lui toute cette spiritualité mélangée de l'Inde, entre islam et courants hindouistes, qu'il vivait de manière pacifiée en combattant pour la tolérance :
Où est la nuit quand le soleil brille ?
S'il fait nuit, c'est que le soleil a retiré sa lumière.
Là où il y a connaissance, l'ignorance peut-elle demeurer ?
Et s'il y a ignorance, la connaissance doit périr.
S'il y a luxure, comment y aurait-il Amour ?
Où est l'Amour, il n'y a pas de luxure.
Saisis ton épée et vas à la bataille.
Combats, ô mon frère , tant que durera ta vie.
L'humanité partage ce sentiment que la spiritualité est un progrès, un travail et un combat de chaque jour pour essayer de s'améliorer, de se transcender, de se dépasser et de donner le meilleur de ce que l'être humain peut donner", nous dit encore Leili Anvar.
Et j'ai fait le lien avec des paroles de Frédéric Lenoir à propos d'Edgar Morin et son idée de patrie mondiale.
Edgar Morin cite la Marseillaise, et ses couplets peu connus. On y retrouve une aspiration universelle vers la liberté qui ne se réalise pas sans un combat long et un travail de tous les instants.
La France que l'Europe admire
A conquis la liberté
Et chaque citoyen respire
Sous les lois de l'Egalité;
Un jour son image chérie
S'étendra sur tout l'univers.
Peuples, vous briserez vos fers
Et vous aurez une patrie !
La Marseillaise a une portée universaliste et la Patrie mentionnée ici rappelle la patrie mondiale dont parle Edgar Morin, qui se fera avec un esprit révolutionnaire, un esprit de liberté et d'égalité. La République française est depuis ses fondements marquée par cette aspiration universaliste et il serait complètement erroné de vouloir se replier sur soi au nom d'une "France éternelle" comme on l'entend souvent dans les discours d'extrême-droite. Ce serait tourner le dos à ce qu'est la tradition française qui aspire au contraire à ce qu'un certain modèle d'égalité et de fraternité se répande dans le monde entier et continue d'avoir une voix, une influence universelle.
Les deux combats se rejoignent, me semble-t-il, dans une haute idée de ce que nous pouvons être et de ce que nos idéaux communs peuvent porter.