dimanche 30 juin 2019

Berthe Morisot : une vie de femme

Avant les vacances et le passage vers d'autres activités qui m'éloignent de mon écran, voici quelques notes au sujet d'un destin de femme passionnant.




Je ne connaissais Berthe Morisot qu'au travers de quelques tableaux qui se glissent dans les musées au milieu de ceux de ses collègues hommes impressionnistes. On sait tout de suite que ces tableaux ont été faits par une femme : les sujets (des femmes et des enfants le plus souvent, dans des jardins, des parcs, au bord de l'eau), la peinture légère et comme esquissée, les couleurs douces et tendres.


On nous la présentait comme une femme ayant travaillé au milieu de ces messieurs, sans plus de considération pour ses œuvres.

J'ai lu le beau livre de Dominique Bona : Mes vies secrètes dans lequel elle nous raconte comment sont nées les biographies qu'elle a écrites tout au long de sa vie et j'ai découvert son travail sur Berthe Morisot. Ajoutons à cela que l'artiste fait l'objet d'une exposition pour elle toute seule en ce moment à Paris, qui montre qu'elle est vraiment reconnue au même titre que ses pairs masculins, et c'est tant mieux.
Voilà l'occasion de redécouvrir ses œuvres dans leur ensemble, et il est toujours très intéressant de rentrer dans la vie d'un artiste par l'intermédiaire de ses œuvres.
Mais cela ne suffit pas, nous dit Dominique Bona et pour elle, la vie de l'artiste peut éclairer son oeuvre et nous la faire apprécier avec plus de bonheur et de justesse.



L'origine de la biographie qu'elle a écrite, nous dit Dominique Bona, tient dans un contraste : la peinture aux couleurs claires et tendres de la peintre et le portrait tout en noir qu'en a fait Edouard Manet. Il faut reconnaître que c'est intrigant.

Et nous allons découvrir avec Dominique Bona cette vie de femme passionnée par la peinture, qui vivait au milieu des artistes de son époque tout en menant une vie de femme, d'épouse et de mère très impliquée.
Ses peintures montrent une vie tranquille aux couleurs du bonheur, mais elle fait preuve d'une grande liberté. Le mouvement impressionniste est révolutionnaire à son époque et Berthe Morisot prend une grande part aux recherches de ces peintres avant-gardistes et donc rejetés dans un premier temps. Elle est très impliquée dans le mouvement et en côtoie tous les artistes . Elle  noue une grande amitié (ou peut-être plus ?) avec Edouard Manet et épousera son frère, Eugène. 
Voilà une femme à la vie apparemment rangée et qui fut très libre et créatrice sans être vraiment reconnue à sa juste valeur de son vivant, sinon par ses pairs.
Paul Valéry, qui épousa sa nièce, dira d'elle :
"La singularité de berthe Morisot fut de vivre sa peinture et de peindre sa vie, comme si ce lui fut une fonction naturelle et nécessaire, liée à son régime vital, que cet échange d'observation contre action, de volonté créatrice contre lumière."





Voilà une vie qui ne laisse pas indifférent. Et il n'est que justice qu'elle soit aujourd'hui reconnue comme une artiste majeure, elle qui fut déconsidérée parce qu'elle était une femme qui osait s'aventurer dans ce monde de l'art. 





lundi 24 juin 2019

Étranges corps célestes




L'histoire de la comète de Halley est passionnante.
Les hommes avaient observé depuis très longtemps dans le ciel ces boules lumineuses avec leur chevelure qui ne semblaient pas , comme le reste des étoiles, obéir à des règles d'apparition prévisibles. Ils en avaient généralement très peur et elles étaient censées annoncer de grandes catastrophes.
Mais les scientifiques se sont penchés sur leur cas et Halley en 1705 a pu montrer que cette comète qui avait été vue dans le ciel en 1682 revenait régulièrement et qu'on pourrait la voir à nouveau en 1758. Il ne fut pas cru et ne put vérifier sa prévision. Mais plus tard ses calculs furent repris et précisés et la comète apparut bien à nouveau en 1759 , lui donnant raison. Ainsi fut expliqué le mystère de ces corps célestes que sont les comètes. Cette comète-ci prit le nom de son "découvreur " : Halley.

La comète est une boule de glace et de poussières qui tourne autour du soleil ( en 76 ans pour celle de Halley) selon une orbite elliptique. En passant près du soleil qui la réchauffe elle acquière une chevelure et une queue de gaz très spectaculaires. Les scientifiques pensent maintenant que les briques élémentaires ayant servi à créer la vie pourraient exister déjà dans ces comètes arrivées des confins du système solaire il y a bien longtemps. Elles pourraient donc nous aider à comprendre les débuts de la vie sur terre.
Le prochain passage de la comète de Halley dans notre ciel est prévu en 2061.




La découverte de Halley fut immortalisée par Victor Hugo dans ce poème de la légende des siècles :

La comète 

Il avait dit : - Tel jour cet astre reviendra. –
...
Il mourut.
L’ombre est vaste et l’on n’en parla plus
... On oublia le nom,
L’homme, tout ; ce rêveur digne du cabanon,
Ces calculs poursuivant, dans leur vagabondage
Des astres qui n'ont point d'orbite et n'ont point d'âge,
Ces Soleils à travers les chiffres aperçus ;
Et la ronce se mit à pousser là-dessus. ...
On vivait. ...
Et depuis bien longtemps personne ne pensait
Au pauvre vieux rêveur enseveli sous l'herbe.
Soudain, un soir, on vit la nuit noire et superbe, ...
Blêmir confusément, puis blanchir, et c'était
Dans l'année annoncée et prédite, et la cime
Des monts eut un reflet étrange de l'abîme
Comme lorsqu'un flambeau rôde derrière un mur,
Et la blancheur devint lumière, et dans l'azur
La clarté devint pourpre, et l'on vit poindre, éclore,
Et croître on ne sait quelle inexprimable aurore
Qui se mit à monter dans le haut firmament
Par degrés et sans hâte et formidablement ; ...
Et soudain, comme un spectre entre en une maison,
Apparut, par-dessus le farouche horizon,
Une flamme emplissant des millions de lieues,
Monstrueuse lueur des immensités bleues,
Splendide au fond du ciel brusquement éclairci ;
Et l'astre effrayant dit aux hommes : « Me voici ! »

Victor Hugo,   La légende des siècles.



Les comètes ont beaucoup inspiré les poètes de l'amour, et la comparaison peut être faite avec la passion qui embrase et s'évanouit sans prévenir...
"C'est qu'il faut du temps pour aimer, tellement de temps que le temps ne suffit pas à répondre aux besoins de l'amour en nous, aux demandes en nous de la voix, du sang, du sang lacté dans la voix firmament. La comète de l'amour ne frôle notre cœur qu'une fois pas éternité. il faut veiller pour la voir."
Christian Bobin (La petite robe de fête)

lundi 17 juin 2019

Le temps qui passe et la concentration


Que cherchons-nous ? Ce texte d'André Gide sur le temps qui a passé est souvent cité car il sonne juste quand on atteint un certain âge.




Le temps s'est écoulé comme une rivière , je ne l'ai pas vu passer !
J'ai compté mes années et j'ai découvert que j'ai moins de temps à vivre ici que je n'en ai déjà vécu.
Je n'ai désormais pas le temps pour des réunions interminables, où on discute de statuts, de règles, de procédures et de règles internes, sachant qu'il ne se combinera rien...
Je n'ai pas le temps de supporter des gens absurdes qui, en dépit de leur âge, n'ont pas grandi.
Je n'ai pas le temps de négocier avec la médiocrité. Je ne veux pas être dans des réunions où les gens et leur ego défilent.
Les gens ne discutent pas du contenu, à peine des titres
Mon temps est trop faible pour discuter de titres.
Je veux vivre à côté de gens humains, très humains.
Qui savent sourire de leurs erreurs.
Qui ne se glorifient pas de victoires.
Qui défendent la dignité humaine et qui ne souhaitent qu'être du côté de la vérité et de l'honnêteté.
L'essentiel est ce qui fait que la vie vaut la peine d'être vécue.
Je veux m'entourer de gens qui savent arriver au cœur des gens.
Les gens à qui les coups durs de la vie ont appris à grandir avec des caresses minces dans l'âme.
Oui... J'ai hâte... de vivre avec intensité, que seule la maturité peut me donner.
J'exige de ne pas gaspiller un bonbon de ce qu'il me reste...
Je suis sûr qu'ils seront plus délicieux que ceux que j'ai mangé jusqu'à présent.- personne n'y échappe riche , pauvre intelligent , démuni ...

André Gide, Le temps qui passe




Et si vous ne pouvez éliminer de votre route tout ce qui dérange, adoptez la stratégie du samouraï.
Voici une histoire pour apprendre à avoir la distance nécessaire et l'écoute juste face à l'autre et aux situations difficiles.
Une histoire que l'on raconte à propose de Musashi, un très grand samouraï du XVIe siècle.
"Musashi devait surveiller un piètre sabreur qui venait d'être provoqué par un vrai samouraï et ne savait pas comment se défendre.
"Vous savez, j'ai mis une vie à apprendre ce que je sais", avertit d'emblée Musashi avant de lui demander son métier.
_ Je suis maître de thé pour une noble famille, lui répondit son solliciteur. Comme je ne peux pas leur faire perdre la face, je souhaite au moins aller à ce duel de façon honorable.
_Faites-moi une tasse de thé" lui intime Musashi.
L'homme met l'eau sur le feu. Musashi le regarde préparer la cérémonie du thé. Il voit qu'il maîtrise son art et ce constat le rassure. Il remarque surtout la sérénité sur le visage de l'homme.
_ Quand vous allez rencontrer le samouraï, lui conseille-t-il, alors imaginez que vous allez lui préparer une tasse de thé."
Et c'est ce qui s'est passé. Au moment du duel, l'homme a regardé le samouraï en pensant au thé qu'il pourrait lui offrir. Son visage était calme, impassible. "Il est tellement serein qu'il doit être très fort" a pensé le samouraï, qui s'est défilé."




Nous ne sommes pas des samouraïs et n'avons pas à nous battre en duel, mais il peut être intéressant de garder cette histoire en tête pour faire face aux événements de la vie...

dimanche 9 juin 2019

Une journée d'humanité



Journée de supervision en astrologie, hier. Qu'est-ce donc ? Une journée pour celles et ceux qui ont fait les formations d'astrologie avec Sylvie Lafuente Sampietro.
Nous nous connaissons depuis longtemps mais nous ne voyons pas souvent : il est agréable de nous retrouver !
Nous apportons des cas à étudier, ceux qui nous ont posé problème en consultation astrologique en général.
Et nous les reprenons ensemble, Sylvie nous guide et nous aide à mieux comprendre.
Les cas sont des problèmes concrets et souvent douloureux : comment aider le père d'une jeune fille qui devient anorexique, quels conseils donner à une grand-mère qui voit sa petite fille en difficulté face à sa mère, que proposer à une femme qui a quarante ans et s'aperçoit que sa vie ne correspond pas à ce qu'elle voudrait ?
Telles étaient les questions d'hier.



Il ne s'agit pas de régler le problème de l'anorexie à la place des médecins et des parents mais peut-être de faire comprendre à un père qui réduit ce grave problème de santé à une question d'orientation scolaire qu'il peut réfléchir à mettre des mots sur ce qui ne s'est pas dit dans la famille. Poser des mots sur tous les non-dits restés en suspens dans cette famille pourrait être source de guérison. Essayer de comprendre ce qui a pu amener cette jeune fille pleine de dynamisme à cette extrémité nous conduit à étudier comment elle n' a pas été écoutée. L'astrologie nous permet aussi de voir comment cette crise grave peut être l'occasion de réaliser son désir et d'avancer dans la vie, si elle ne se laisse pas sombrer.
Une grand-mère qui veut intervenir dans l'éducation de sa petite fille peut être vue comme intrusive et les enfants peuvent vouloir se protéger de cette tendance à se substituer à eux. Mais il nous est possible de montrer à cette grand-mère comment elle peut aider sa petite fille à trouver un cadre lorsqu'elle en a la charge, tout en laissant ses parents s'en occuper le reste du temps.
Et lorsque quelqu'un s'aperçoit à 40 ans, que la vie qu'elle s'est construite n'a plus de sens, il est très utile de lui indiquer comment effectuer ce passage difficile vers une vie plus conforme à ses désirs.
Cela nous a rappelé cette petite histoire assez courante chez les femmes : pendant 40 ans, on met toutes ses forces à monter les barreaux d'une échelle pour s'apercevoir à 40 ans qu'on n'a pas monté la bonne échelle. Nous pouvons pour elle aussi trouver des pistes pour la rassurer sur son avenir, ses possibilités de réorienter sa vie et les opportunités qui vont se présenter.
Ce sont toutes des histoires de vie que rencontre l'astrologue et  sur lesquelles il peut donner des pistes pour continuer à avancer.
Nous avons passé, avec ces vies que nous avons un peu partagé et essayé de comprendre pour les aider, une belle journée, riche en humanité et en espoir.


 
Terminons avec les mots de Marie-Madeleine Davy, éclairants sur notre chemin :

"Ne cherche pas, mon ami,
Ne cherche pas la plaine;
Tu souffrirais
D'une mauvaise souffrance.

Fuis la plaine sans te retourner
Et ne cherche pas la trace d'un chemin.

Monte, même si tu t'essouffles,
Même si tes pieds trébuchent.
Monte encore, monte toujours,
Ne te retourne pas.
Ne regarde pas du côté de l'abîme
D'où vient le vertige.

Monte sans rien fixer des yeux,
Si ce n'est en toi-même
Le soleil qui conduit tes pas."
Marie-Madeleine Davy


dimanche 2 juin 2019

Bon sens et espérance


Voici une réflexion sur Dieu et le sens à lui donner aujourd'hui. Elle nous mène vers notre propre cheminement et nous pose la question de l'espérance et du sens de la vie.



   On dit qu'au temps où les Upanishad (texte fondateur de l'hindouïsme) furent écrits, un roi organisa un concours pour savoir quel était l'homme le plus sage de son empire. L'un d'eux, Yajnavalkya, qui avait répondu avec sagacité à toutes les questions posées, demanda avec une certaine arrogance, de recevoir le prix prévu de 1000 vaches aux cornes ornées.
Une jeune femme surgit alors du public et demanda au monarque le doit de poser deux dernières questions. Elle s'appelait Gargi et interrogea ainsi l'érudit qui la toisait avec condescendance : "Qui a créé le monde ?" L'homme éclata de rire et répondit avec morgue : "Dieu bien sûr ! Tout ce qui existe doit avoir un créateur !" Gargi lui posa alors sa seconde question : "Si tout ce qui existe doit avoir un créateur, qui a créé Dieu ?" L'arrogant ne sut que répondre et la jeune femme gagna le troupeau de 1000 vaches.
Ce conte pose la question de nos croyances.Quel est ce vice de forme et de structure de nos mentalités qui fait que celles-ci doivent être toujours exclusives et non excluantes ? Pascal remarquait déjà : "Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà." Cette formule s'applique à tout, aux rapports entre les humains, entre les religions, les partis politiques, les courants philosophiques, les idées différentes... Comme si l'affrontement entre croyances régissait les rapports humains.



Pour en revenir à Dieu, on peut regretter que ce mot, symbole absolu du mystère qui nous fonde, soit devenu dans l'histoire le prétexte ultime à querelle, y compris au sein d'une même religion. Un sage hindou du XIXe siècle, Ramakrishna, disait : "L'eau s'appelle différemment selon les langues, wasser, water, aqua, pani, mà... mais c'est toujours la même eau. Il en va de même pour Dieu." Ce message de simple bon sens ne pourrait-il être entendu au XXIe siècle ? Bien sûr rituels, textes, objets de foi diffèrent, mais pourquoi s'entretuer pour eux au lieu de les respecter comme des créations multiples de l'esprit humain en quête de sens et de réconfort ? Car la seule réponse utile que le dieu intérieur qui habite chacun de nous peut donner, réside dans la pacification de l'âme. Concluons avec cette maxime du philosophe grec Héraclite , qui constatait, au VIe siècle avant notre ère : "Sans l'espérance, tu ne trouveras pas l'inespéré." Donnons-nous donc les outils de l'espoir.
Marc de Smedt




Les outils de l'espoir sont ce qui donne un sens à notre vie. Comme le propose Goethe dans les "Années d'apprentissage" de William Meister, "il nous est impossible de vivre une vie qui n'aurait aucun sens. C'est donc à nous-mêmes de résoudre intérieurement cette question cruciale en trouvant une direction à notre existence." Bertrand Vergely convoque des philosophes, écrivains, des poètes et des mystiques pour nous éclairer. Il en dégage sept règles communes : la vie comme un art, comme passion, comme présence, comme attention, comme ascèse, comme sagesse et la vie comme douceur.
Voilà l'espoir retrouvé et comme le dit Bertrand Vergely : "Cette question (du sens de la vie) ne nous importe-t-elle pas au plus haut point, parce que se la poser, c'est poser la question même de la vie ?"