lundi 14 mars 2022

Libération

 Un conte du livre des chemins de Henri Gougaud, voilà ce que je vous propose aujourd'hui.

Un joli conte, léger et plein d'amour.


L'oiseau de Junayid

On raconte qu'un jour, un ami de passage offrit un bel oiseau au sage Junayid. Le saint homme le prit tout doux contre son cœur, caressa un moment ses ailes, puis les baisa, ouvrit les mains, et le rendit au vaste ciel. L'ami s'en étonna. Il demanda :

_ Pourquoi ?

Junayid répondit : 

_ Il m'a dit à l'oreille : "Ne trahis pas l'amour que tu ressens pour moi. S'il te plait, Junayid, pas de cage entre nous." Quand il s'en est allé (ne l'as-tu pas entendu ?) son cri de joie m'a remué jusqu'au plus secret de mon âme. Tu m'as offert, plus qu'un oiseau, la bénédiction d'un oiseau."

On dit que l'envolé s'en revint chaque jour pour rendre visite au saint homme. Le matin, il le réveillait, perché au bord de sa fenêtre. Le soir, il mangeait avec lui. Ce fut ainsi longtemps, puis Junayid mourut. Alors l'oiseau s'en vint nicher dans le creux de sa main ouverte, se coucha et mourut aussi.

A quelque temps de là, un disciple rêva de son maître défunt. En songe ils parlèrent un moment. 

Junayid lui dit, à la fin :

_ Nous nous voyons souvent (il parlait de l'oiseau), nous conversons ensemble, mais entre nous demeure un point de désaccord. 

_ Vous m'étonnez. Lequel ? lui demanda l'ami. 

_ Celui-ci : De lui ou de moi, qui a vraiment libéré l'autre ?



"L'attention créatrice consiste à faire réellement attention à ce qui n'existe pas." Simone Weil

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