Nous avions cette semaine la visite de Fabrice Midal à Grenoble. Il venait nous parler de son dernier livre : "Foutez vous la paix ! Et commencez à vivre".
Le sujet est provocateur et pas forcément aisé à comprendre et à appliquer.
Il veut nous inciter à refuser la dictature de l'efficacité à tout prix et du toujours plus.
Nous avons toutes sortes d'exemples dans notre vie où nous nous torturons avec ce que nous devons faire, où nous obéissons à des injonctions que nous nous mettons nous-mêmes, où nous avons honte de nous. Il s'offusque aussi de la dictature du calme : il nous faudrait être calme et serein en toutes circonstances.
Tous ceci le conduit au constat que nous pouvons tout simplement nous foutre la paix et refuser tous ces diktats pour devenir simplement ce que nous sommes réellement et devenir pleinement nous-mêmes et créatifs.
Une méditation de pleine présence qui est pratiquée sans objectif mais avec simplement la présence à ce qui est représente déjà un premier pas vers ce "Foutez vous la paix." On peut aussi lorsqu'on s'observe dans une des situations où nous répondons à des injonctions, tout simplement nous dire : "Maintenant, je me fous la paix !"
Ces réflexions sont intéressantes et nous interrogent bien sûr sur ce que la vie actuelle nous demande et comment nous le vivons. Ce constat est salutaire pour beaucoup d'entre nous.
Je crois qu'une des façons de quitter cet état où nous devons toujours être actifs et faire quelque chose peut être de se tourner vers l'art.
Ecouter une musique sublime, être en admiration devant une oeuvre peinte, ou lire un poème qui parle à notre âme, voilà, avec le spectacle de la nature, des moments où nous pouvons accepter de nous foutre la paix et être présent, simplement.
Revoici donc François Cheng et la beauté, avec un extrait de ses "Cinq méditations sur la beauté", où l'on se trouve bien au-delà, là où nous pouvons aller lorsque nous nous foutons la paix :
"Dans une peinture, le paysage que l'artiste fait naître sous son pinceau peut être altier ou tourmenté, compact ou éthéré, nimbé de clarté ou pénétré de mystère. L'important est que ce paysage dépasse la dimension de la seule représentation et qu'il se donne comme une apparition, un avènement. Avènement d'une présence _ non au sens figuratif ou anthropologique du mot_ que l'on peut ressentir ou pressentir, celle même de l'esprit divin. Avec toute sa part d'invisible, cette présence correspond à ce que les théoriciens chinois appellent le xiang-wai-zhi-xiang, "image au-delà des images". Elle est proche aussi de ce que la spiritualité Chan expérimente comme illumination. Lorsque, devant une scène de la nature, un arbre qui fleurit, un oiseau qui s'envole en criant, un rayon de soleil ou de lune qui éclaire un moment de silence, soudain, on passe de l'autre côté de la scène. On se trouve alors au-delà de l'écran des phénomènes, et l'on éprouve l'impression d'une présence qui va de soi, entière, indivise, inexplicable, et cependant indéniable, tel un don généreux qui fait que tout est là, miraculeusement là, diffusant une lumière couleur d'origine, murmurant un chant natif de cœur à cœur, d'âme à âme."
Illustrations : Paul Cézanne
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